Les technologies numériques ont maintenant envahi notre quotidien, touchant à des degrés divers, tous les domaines, tous les âges et toutes les catégories de population. L’éducation nationale a donc décidé d’équiper les établissements scolaires en matériel informatique et notamment en tablettes numériques pour les intégrer pleinement dans la scolarité des élèves. Il apparait donc légitime de se poser la question de l’effet de ces technologies numériques sur l’apprentissage.
En premier lieu, la lecture sur écrans présente des problèmes avérés comme la désorientation et la surcharge cognitive ou le lecteur est noyé sous la masse d’information à traiter ; il doit également effectuer plusieurs actions à la fois, ce qui rend la lecture plus complexe: il doit lire, vérifier la pertinence de l’information et cliquer ou non sur les liens hypertextes en fonction de ses choix de lecture. Fonctionnement qui conduit la plupart du temps à une lecture sans réel prélèvement d’information puisque le lecteur ne s’attarde pas sur le contenu : phénomène connu sou le nom de « zapping » de l’information. Celui-ci est du au fait que le lecteur ait des difficultés à créer un contexte, au contraire de la lecture sur papier, et tend à rendre la lecture sur écrans superficielle.
Thierry Baccino, professeur de psychologie cognitive et ergonomique à l’université Nice-Sophia-Antipolis, déclare que « La lecture est un processus très gourmand en capacités cognitives. Elle mobilise successivement pour le seul décodage des mots plus de 6 zones cérébrales. Si le cerveau doit en plus solliciter des zones de reconnaissance de forme, de position, de vitesse ou de couleurs, il se retrouvera rapidement en surcharge. De fait, face à un contenu multimédia, la vitesse de lecture chute de 25% ». Il rajoute également que « le stress déclenché par des hypertextes offrant un très grand nombre de pages à visiter fait perdre jusqu’à 30% de la force de travail »
Mais cette lecture sur écrans, plus gourmande en énergie qu’une lecture sur papier, a un autre effet négatif : elle affecte la mémorisation. Le professeur de psychiatrie Manfred Spitzer déclare que «Les médias numériques sont nuisibles au développement de la mémoire, ne sont pas adaptés à l’encouragement de l’apprentissage et provoque des dépendances». Par exemple, les étudiants vont chercher les réponses sur Google aux questions posées et ils oublient rapidement l’information car ils savent où la retrouver surtout si elle est enregistrée sur leur ordinateur qui devient une sorte de mémoire externe.
Les études PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves) ont montré que les adolescents ayant le plus accès à un ordinateur personnel à l’école étaient également ceux ayant en moyenne les moins bonnes notes. Le «zapping» d’information, précédemment évoqué, est le facteur cité comme cause de perte de concentration. Qui plus est, selon les résultats d’une enquête récente menée par 62 professeurs d’universités allemandes, les étudiants ayant grandi avec internet avaient plus de difficultés pour résumer un texte et pour se concentrer, et posséder une moins bonne logique argumentative ; ces déficits seraient dus à une sorte d’overdose numérique.
Pour finir, une étude américaine publiée dans la revue « Proceedings » de l’Académie américaine des sciences sur l’apprentissage du langage a démontré que c’est essentiellement par le son et à l’oral que les mots sont le mieux intégrés, les écrans ne seraient donc pas adaptés à cette apprentissage car ils stimulent moins l’oral ; bien que l’aspect interactif d’une tablette est non négligeable, encore faut-il le mettre à profit correctement.
Il apparait donc, qu’en dépit de l’apparente nécessité d’intégrer les technologies numériques dans l’éducation, il va falloir rendre pédagogiquement pertinentes les tablettes et adapter les méthodes d’apprentissage à ces nouveaux supports afin d’éviter les nombreux problèmes qui pourraient en résulter et qu’il en découle une véritable valeur ajoutée.
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